Dès que Léon est rentré dans ma vie, j’ai su que son existence de hamster roux et angora allait être courte. Et que sa disparition provoquerait une abyssale blessure en moi. Alors j’ai pensé à la taxidermie. Et j’ai trouvé ça trop. Trop salon de grand-mère mélancolique. Trop chasseur de lion. Ou chasseur tout court. Oui: trop. ” Il FAUT que tu ailles voir le taxidermiste de ma mère ! «, me dit mon amie. Nous pédalons, pédalons. Profitons de la route pour saluer notre ami Anselme, empailleur lui aussi, mais de chaises. Quand soudain, c’est ici. FLASH ! Une vitrine à te faire reculer d’un pas. Tellement il y a de paires d’œil de verre qui te regardent dans des positions bizarres. Celles de gens encore en vie. Une vitrine que personnellement, j’ai pas rigolé à lécher… Le seuil et l’appréhension franchis, il y en a tellement partout que mon regard s’habitué. Des cerfs, des poissons, des oiseaux, des lapins, des taupes, des trucs sans noms. Accrochés aux murs comme on porterait le collier. Sur des étagères en verre, les petits formats. De l’établi du fond vient une femme aux cheveux auburn, au regard bleu. Très belle. C’est une artiste. D’où l’hybride tortue-souris. Artiste qui né s’attendait pas à devenir naturaliste un jour. Mais son amour pour chaque animal qui passé entre ses mains, et son imagination donnent des résultats qui me plaisent. En plus des os, j’aime le glauque ! Stéphanie Barthes a repris en avril dernier le commerce d’André Rouillon. Qui continue de travailler avec elle. Le passionné ! Des travaux sont prévus pour lui permettre d’exposer l’ensemble de son travail: projection vidéo, créations hybrides, et d’autres réjouissances artistico-taxidermistes. Je suis sortie de là, captivée par l’idée géniale de rassembler la création artistique contemporaine et ce métier poussiéreux. Qui plus est, à la clientèle mélancolique. Mais sachez, pour les intrigués, que ce métier disparaît: la dernière école se ferme… «Résister c’est créer. Créer, c’est résister». Qui l’a dit, déjà?